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LibanPost réponds - Récit du Président-Directeur général de LibanPost

Voici la dernière partie de la série d’article de l’UPU sur LibanPost, qui montre comment l’opérateur désigné libanais a continué de travailler après l'explosion survenue le 4 août à Beyrouth.

Selon Khalil Daoud, Président-Directeur général de LibanPost, les explosions qui ont ravagé Beyrouth le 4 août dernier ont coûté environ 120 000 USD au service postal libanais.
 
L'explosion n'a fait qu'aggraver les difficultés économiques de LibanPost.
 
L'effondrement économique du Liban a dévasté le pays, la monnaie locale ayant perdu plus de 80% de sa valeur au cours de l'année. Les conséquences sont terribles, mais c’était à prévoir.
 
«Dès janvier, nous avons informé nos actionnaires que nous allions subir de graves pertes cette année», a déclaré M. Daoud. «Ce sera la première fois. Bien que nous soyons une organisation privée, notre activité a été rentable au cours des seize ou dix-sept dernières années. Nous faisons vraiment figure d'exception dans le pays. Nous avons lancé un plan de diversification il y a longtemps et c'est ce qui nous a permis de nous maintenir à flot.»
 
Les projections selon lesquelles des pertes étaient à prévoir ne découlaient pas seulement des prévisions économiques pour le pays, mais aussi de la décision de ne licencier aucun employé ni de réduire les salaires, quoi qu'il arrive à l'économie libanaise.
 
«Soit vous devez subir des pertes, soit vous devez réduire les salaires et licencier des employés. Donc, puisque nous avons pris la décision de soutenir nos employés, nous savions que nous allions subir des pertes.»
 
«Nous faisons partie des rares entreprises qui se maintiennent encore sur le marché aujourd’hui et pourtant nous nous sentons coupables de ne pas pouvoir faire plus. Avec la dépréciation de la monnaie, un salaire mensuel de 1000 USD il y a un an équivaut aujourd’hui à moins de 200 USD.»
 
Selon M. Daoud, les dommages matériels et économiques étaient le cadet de ses soucis après l'explosion.
 
«Évidemment, le plus grave a été la perte de l’une de nos employés. J’ai été informé que l’une de nos employés qui travaillait au bureau de poste de la Banque centrale du Liban et qui célébrait son anniversaire de mariage ce jour-là avait été tuée par l’explosion, aux côtés de son mari, laissant derrière elle deux enfants.»
 
«On a aussi déploré un grand nombre de blessés parmi les membres du personnel de LibanPost; certains ont été gravement touchés, d'autres ont eu plus de chance. Certains n’ont pas donné signe de vie pendant plusieurs jours.»
 
Alors qu’il s’efforçait de déterminer la situation de chacun de ses employés, M. Daoud a dû faire face rapidement au cauchemar logistique provoqué par l’explosion. Trois cent mille clients venaient de se retrouver sans abri, des bureaux étaient détruits et il fallait évaluer les dégâts avant de pouvoir déterminer quand ils pourraient rouvrir.
 
Au cours des deux dernières années, LibanPost avait acheté cinq caravanes en vue de déployer des bureaux de poste mobiles. Au départ, l'idée était de les installer dans des lieux de villégiature à la montagne ou de profiter des festivals. Aujourd'hui, en raison de la tragédie, elles ont été utilisées dans les zones détruites de Beyrouth afin d’éviter une interruption du service.
 
Quinze bureaux de poste, sur les 110 que compte le réseau, ont été endommagés, dont trois gravement.
 
LibanPost avait également mis en place un «système à domicile» permettant d'effectuer en ligne ou par téléphone toutes les opérations  qui pouvaient être réalisées au bureau de poste. «Tout cela a contribué à pallier l’absence de personnel dans les processus opérationnels.»
 
LibanPost a reçu de nombreuses propositions d’aide de la part d’organisations postales internationales, a indiqué M. Daoud. «Nous avons refusé parce que je pense que la priorité doit être donnée aux organisations non gouvernementales et aux personnes qui sont vraiment dans le besoin. Nous réussirons à nous rétablir sur le plan financier, mais ces organisations non gouvernementales sont dans une situation désespérée.»
 
Afin d'aider la ville, LibanPost va émettre un timbre qui coûtera l'équivalent de 7 USD. Les recettes seront versées à la protection civile libanaise – une organisation bénévole qui regroupe les pompiers, les services d’ambulance et les équipes de secours du pays.
 
«Chaque fois qu'il y a un drame au Liban, ces services sont en première ligne pour apporter de l'aide, mais bien qu'ils fassent partie de l'administration publique, ils sont négligés et ne bénéficient ni des moyens ni du soutien nécessaires», a déclaré M. Daoud.
 
La maison de M. Daoud a été entièrement détruite par l'explosion, et il a dû se rendre à l’hôpital pour faire soigner des blessures dues aux éclats de verre.
 
«Cela fait partie de la vie quotidienne de tout responsable: vous ne pouvez pas vous permettre d'être submergé par les émotions. J'ai été blessé. Je suis donc allé à l'hôpital, et une heure plus tard, j'étais de retour chez moi et j'avais deux préoccupations: l'entreprise et les employés, d’une part, et l'évaluation des dommages, d’autre part.»
 
Compte rendu de la journaliste indépendante Abbie Cheeseman, Beyrouth (Liban).

Photo credit: LibanPost